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IMMIGRATION : … et ça se passe dans un village Français !

Il y a en France de nombreux petits villages qui, depuis les années 70, ont perdu énormément de leurs habitants. Les raisons sont simples, les grands réseaux routiers, internet et autres, n’étant pas disponibles dans ses lieux, n’attirant pas les entreprises préférant les grands centres urbains, l’emploi forcément dans ces petits villages disparaissant années après années.

C’est ainsi qu’un de ces villages, dans le centre de la France, a vu sa population fondre en moins de 20 ans, passant de 1050 habitants à moins de 250. Ce village comptait dans les années 1990, une vingtaine de commerces, environ une trentaine d’artisans, plus des services publics de proximité, poste, CCAS, trésor public, école publique, etc. En 2010 il n’y avait plus rien, enfin si une boulangerie, et encore qui ne fait plus que dépôt de pain, et l’église, ne servant plus qu’aux enterrements.

Trop éloigné des grands centres urbains, le village comptait plus de 300 logements vides, à vendre pour la plupart pour une bouchée de pain, sachant que chaque année avec la disparition des plus âgés, d’autres logements seraient vaquant, les jeunes eux désertant immanquablement le village, la vie s’en enfuyant irrémédiablement.

Madame Delaporte, Maire du village consciente de ce problème, était résolue à trouver une solution. Elle réunit son conseil municipal et lui fit une proposition, chiffres à l’appui, apportant des éléments concrets, faisant venir des spécialistes, des conseillers, apportant en bref tous les éléments possibles à la concrétisation de ses idées, décidant chacun à soutenir cette action.

Moins d’un mois plus tard, elle convoqua la totalité des villageois à une grande réunion ayant pour intitulé : « sauvons notre village ». La salle municipale était pleine, Madame le maire pris la parole.

Passé l’historique du village, le nombre de maisons abandonnées, presque en ruine pour certaines, passé les problèmes de démographie, ceux des commerces, artisans et autres services de proximité, elle entre dans le vif du sujet, en quelques mots, clairs, nets et précis. «

“Nous avons donc décidé avec le conseil municipal, de faire venir, d’accueillir, ici dans notre village, un millier de personnes immigrées, leurs proposant un logement ainsi que tout ce qu’un village comme le nôtre est capable de proposer à de nouveaux habitants.”

Elle continue avec des mots encore plus forts. “Les gens, qu’ils soient immigrés ou non, mangent tous, boivent tous, consomment tous, ont des besoins de services de proximité, de commerces de proximité, devant comme les autres s’organiser en associations, en entreprises pour mettre en place ces services, les faire vivre. La réhabilitation de logements demande de l’artisanat, du savoir-faire, des idées nouvelles, des emplois nouveaux, une économie nouvelle… et c’est ce que nous allons faire !”

Même si cette idée était réaliste, les plus conservateurs du village y restaient hostiles, l’idée que des étrangers prennent possession de leurs maisons, de leurs rues, de leur village, le transforme avec des valeurs qui ne sont pas celles du coin, ne les enchantaient guère. Certains n’hésitaient pas à dire tout haut au nom de leur longue lignée d’ancêtres du village, qu’ils préféraient voir le village mourir plutôt que de le voir souillé par de la vermine qui sort d’on ne sait où et dont on ne sait rien… peut-être même des islamistes ! « … et puis ils n’ont pas d’argent ces gens-là, c’est encore l’État qui va devoir payer pour eux, nos impôts, comme-ci la France avait les moyens d’entretenir la pauvreté du monde, ils vont vivre de quoi, le RSA, les allocs, et pis ils ne parlent même pas Français. Etc etc etc… »

Malgré tout Madame le maire qui n’était pas femme à se laisser impressionner, fit dans un premier temps recenser dans le village une vingtaine de maisons, capables sans trop de frais de recevoir une vingtaine de premières familles. Après quelques remises en œuvre et avec l’aide de la collectivité locale, du département, de la région et de la préfecture, un bus, puis deux, déposa un beau matin une centaine de personnes sur la place du village, juste en face de la mairie. Ici pour les accueillir, Madame le maire, son conseil, quelques officiels et surtout des bénévoles associatifs. Les immigrés sont arrivés !

Bien entendu les « hostiles » restaient cachés derrière leurs volets, passant rapidement en voiture, en tracteur, à pieds, dévisageant les nouveaux venus.

La totalité de ces nouveaux habitants étaient des hommes, des femmes et des enfants, tous de couleur noire, sortis tout droit de l’enfer du Mali, pays Francophone d’Afrique de l’Ouest. Vêtus d’affaires qui leurs ont été données à leur arrivée en France, ils étaient habillés à l’européenne, quelques femmes gardant sur leur tête une sorte de fichu cachant leurs cheveux. Tous étaient, il faut le dire, totalement perdus, voire hagards, les yeux grands ouverts, regardant ce lieu typiquement français, avec ses maisons hautes de pierres de taille, ses toits pentus en tuiles rouges, ses rues longues et étroites, et ses quelques arbres nus, il faut dire que nous étions en plein hiver.

Chaque famille finit par découvrir sa nouvelle demeure, toutes aménagées comme c’est de coutume chez nous, cuisine, salle de bain, toilettes, salon, salle à manger, chambres, et parfois même cave et grenier. Chaque pièce était aménagée, des lits bien sûr, mais aussi de la vaisselle, gazinière, fauteuils, tables, chaises, télévision, chauffage, etc… Il ne fallut pas longtemps pour que chacun comprenne à quoi servait tout cela, les enfants s’installant bien plus vite que les parents, heureux de voir toutes ces choses, d’avoir enfin un chez soi.

Les maisons avaient été choisies un peu partout dans le village, certaines proches du centre, d’autres plus éloignées, d’autres encore dans des hameaux. Chaque famille était parrainée par des bénévoles du village, certains voisins proches, d’autres plus lointains, mais tous capables de piloter les nouveaux venus.

L’école, c’est la vie !

Cartables sur les dos, c’est dès le lendemain que la soixantaine de gamins prenait pour la première fois la route de l’école municipale où plusieurs classes avaient été aménagées. Certains accompagnés de leur mère, au passage de ces enfants dans les rues murmurait un son nouveau, un son du passé oublié depuis longtemps. Que l’on soit pour ou contre cette immigration, ce murmure respirait une renaissance, une forme de nostalgie, les villageois dans tous les cas semblant heureux de cette animation, les enfants saluant poliment les gens qu’ils croisaient, leurs sourires radieux de se rendre à l’école du village à des fins d’apprendre donnant de la couleur aux sons, les pas et les rires résonants, montant le long des demeures, graduant le temps, l’heure de l’école en redonnant un rythme oublié. Ce rythme se répétait comme naturel les matins et soirs, les pas, les courses, les rires, les chants, les sourires, les bonjours, les bonnes humeurs, et tout ce qui fait la joie de voir des gamins vivre devenant un rituel essentiel, l’école c’est vraiment la vie.

Les rues s’emplissaient d’autres personnes, des artisans venus faire quelques menus travaux, mais surtout une chose nouvelle qui avait disparue depuis de longues années dans le village.

Madame le Maire avait permis l’ouverture tous les mardis et samedis matin, d’un marché municipal sur la place de la mairie. Bon d’accord, il n’y avait au premier jour pas beaucoup de commerçants juste une dizaine, mais c’était déjà plus que prévu : un poissonnier, un boucher, un marchand de bibelots, un autre d’habits pour femmes, un autre encore vendant bonnets, des écharpes et des gants, une marchande de légumes, un pâtissier, un marchand de fromages, un vendeur de jeans et un marchand de chaussures. C’était surtout un lieu de rencontres entre villageois noirs et villageois blancs, chacun se saluant poliment, d’autres engageant la conversation… « et vous venez d’où, et vous êtes bien logés, et il fait froid, on ne devait pas tardé à avoir de la neige, » et encore des, « nous sommes presque voisines, etc, etc… » La pâte avait prise ! Ce marché fut aussi les premiers sous dans la caisse de la commune, la patente n’étant pas gratuite.

Dans les six mois qui suivirent, ce fut six nouveaux bus qui arrivaient dans le village, avec pas moins de 350 nouveaux venus, tous immigrés d’Afrique de l’ouest et du moyen orient. Chacun était pressé de vivre en harmonie dans le village et avec les villageois, respectant les traditions du coin, les fêtes municipales, celle des moissons, les brocantes, les associations, les coutumes culinaires etc. Mois après mois une authenticité devenue logique pour tous s’était installé, sans différence, le vivre ensemble étant une évidence, les quelques fichus et châles fardant les têtes de certaines mères, donnant un charme supplémentaire, mais toujours respectueux des autres.

La boulangerie avait repris du service, fabricant sur place le pain, mais aussi des pâtisseries et de gros gâteaux. Un des premiers émigrés qui était boucher de métier, après avoir suivi une formation, ouvrit une boucherie. Une des dames du village avec sa sœur ouvrit un petit bar restaurant, embauchant une maman immigrée pour le service du midi. De nouveaux services virent le jour, entretien de jardins, repassage à domicile, réparation de voitures, la commune embauchant elle-même dix employés municipaux, tant qu’au marché, c’est une trentaine de chalands qui chaque semaine venaient y vendre leurs produits.

Mais le plus important allait arriver dans la nuit du premier jour du printemps. Dans une des maisons allouées à une famille d’immigrés, un événement qui n’était pas arrivé depuis de longues années, allait définitivement souder tout le village. Ce jour, Nedjma jeune femme Libyenne de 29 ans, venait de mettre au monde une petite fille, la première née ici depuis les années 70. Ces parents l’ont appelé Patricia, le prénom de Madame le Maire, lui rendant ainsi hommage. Ce village compte aujourd’hui plus de 1500 habitants, ses caisses sont désormais pleines, il y a aussi le plein emploi, d’autant plus que les services de proximité et services publics y sont revenus. Internet haut débit a pu lui aussi y parvenir, permettant à de nouvelles entreprises de s’y installer, avec de nouveaux postes à pourvoir. La très grande majorité des nouveaux villageois a suivi des formations, l’école a ouvert 5 nouvelles classes, et la municipalité a pour projet la construction de deux lotissements, les maisons ce coup-ci à vendre pour des familles non immigrées, attirées par de nouveaux emplois créés dans le village.

Épilogue.

J’ai bien sûr inventé toute cette histoire, aucun village de France n’ayant franchi ce pas de l’immigration. Ce n’est donc qu’une fiction, mais c’est ce genre de fiction que des nations, scandinaves entre autres, ont décidé de suivre. Certaines villes dans ces pays ont compris que l’immigration était une chance, un moyen de parfaire son économie, de créer de l’emploi, de ramener des populations et ainsi sauver des villes et villages en perte de tout.

Certes ce n’est pas simple à faire et à contenir, certaines bulles culturelles ayant toujours tendance à se créer, des communautés se repliant sur leur passé, nostalgiques, culturel, religieux, comportement compréhensible mais pourtant simple à éviter grâce à un important travail de fond, imposant en condition primordiale le respect obligatoire des us et coutumes. Cela ne veut pas dire qu’une personne accueillie ne peut plus se vouer à son culte, mais juste qu’elle ne peut plus imposer sa culture dans le pays, devant impérativement savoir se mettre, elle et sa famille, dans des conditions d’écoute et d’apprentissage des cultures de la nation d’accueil. En cela chacun est responsable, les associations, les systèmes scolaires ainsi que toutes nos autres institutions administratives et culturelles, chacun ayant un devoir d’aide absolue, une assistance heureuse pour tous. Le but est de savoir construire ensemble, offrant à toutes les générations futures, quelles que soient leurs origines, les mêmes patrimoines culturels dans lesquelles ils se reconnaîtront, générations après générations, comme étant un attachement, un repère essentiel à l’équilibre général. Ceci est qu’un exemple d’unification, sa seule fonction étant le vivre ensemble dans le respect de tous, mais surtout dans celui de bases culturelles communes.

Oui ce genre de fiction est largement possible en France, je dirais même qu’elle est à espérer, étant un plus, des plus économiques, mais aussi des évolutions bienveillantes pour toutes les parties, les uns trouvant chez les autres ce qui leur manque et vice versa.

La peur de l’immigré et les multiples âneries que l’on peut raconter sur leur coût, font perdre énormément à l’économie Française. Un immigré et sa famille comme tout le monde, mange, boit, s’habille, consomme, finit par travailler, par créer lui-même de l’économie, des entreprises, créant de l’emploi, payant des impôts de la TVA, etc. Il est donc nécessaire de faire passer ce message, de le partager avec le plus de monde possible, cette fiction étant une réalité économique et sociale d’importance.

Demain nos emplois seront peut-être dans des entreprises créées par des immigrés, demain encore la boulangerie du coin sera sauvée grâce aux nouveaux clients issus de l’immigration, demain enfin la petite Patricia fille de Nedjma deviendra médecin et sauvera votre vie, allez savoir.

IMMIGRATION vous dites ?

Ça pourrait se passer dans nos villages de France.

Gilles Ragnaud